ENTRETIEN AVEC FRANCINE BEST

mercredi 19 janvier 2011
par  Directeur
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 ENTRETIEN AVEC FRANCINE BEST, ancienne directrice de l’INRP

’L’école de la république est ou devrait être une école démocratique où le respect de toute personne, élève, enseignant, personnel de service devrait être la règle.’

Francine Best est Inspectrice Générale de l’Education Nationale honoraire et a été présidente des CEMEA et directrice de l’INRP

 

E.P : Vous êtes l’auteur du grand rapport sur l’éducation aux droits de l’Homme de 1982, quel regard portez-vous sur ce qui a été accompli dans ce domaine au sein de l’institution scolaire depuis la publication de ce rapport ? Quelles sont les plus grandes réussites du système éducatif français dans ce domaine ? et son plus grand échec ?


F.Best : Depuis 1982, année où Alain Savary m’avait confié la mission d’introduire l’éducation aux droits de l’Homme dans le système éducatif français, de notables progrès ont été accomplis, lesquels sont rapportés dans le rapport écrit à la demande des Nations Unies et de l’UNESCO à la fin de ’la décennie de l’éducation aux droits de l’Homme’ 1990-2000.Le plus notable de ces progrès consiste en la re-création de l’éducation civique au collège, avec un programme entièrement construit autour des droits de l’Homme.

Cependant les programmes de l’école élémentaire ont, dans le même temps, subi des appauvrissements considérables puisque, aujourd’hui, on n’y trouve plus aucune référence à deux textes majeurs : La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948, la Convention Internationale des Droits de l’Enfant de 1989.Toutefois le récent anniversaire de cette dernière a semble-t-il relancé, au moins quelque temps, la présentation de ce texte majeur aux enfants.

A cette occasion les mouvements pédagogiques se sont -enfin ! - mobilisés ,ce qui n’avait pas été le cas, malgré mes sollicitations, en 1989 ! L’OCCE, par exemple a organisé trois journées de réflexion sur les droits des filles et des garçons à Clermont-Ferrand.

E.P : Vous avez toujours refusé d’opposer éducation et enseignement, pédagogie et transmission de connaissances, pouvez vous préciser votre point de vue, notamment en ce qui concerne le domaine de l’éducation civique ?

F. Best : Ce qui fait obstacle, c’est l’absurde opposition entre enseignement et éducation comme si cette dernière relevait de la seule sphère familiale, comme si l’acquisition d’un savoir n’avait aucune incidence sur les comportements et sur les actes d’une personne, comme si, réciproquement, les conditions de vie et la manière de vivre au quotidien l’éducation étaient sans influence sur les apprentissages cognitifs et sur les résultats de l’acte d’enseigner ! 

En éducation civique, où l’on ne saurait oublier les droits de l’Homme sans sombrer dans un moralisme étroit, les connaissances et le savoir sont aussi importants que dans d’autres domaines : ignorer les droits de tout homme ,de tout citoyen, c’est se mettre à l’écart de toute action citoyenne, c’est être incapable de vivre et d’agir dans la cité, de « vivre ensemble » en fonction de principes civiques et éthiques. Aussi la présentation, la lecture au cycle des approfondissements, les activités plastiques et d’écriture concernant la DUDH et la CIDE constituent-elles des objets d’enseignement autant que des incitations à la responsabilité éthique et civique.

E.P : L’UNESCO occupe une place très importante dans votre vie, pouvez-vous expliquer pourquoi ?

Quel rôle souhaitez-vous voir jouer par le Réseau des écoles associées à l’UNESCO ?

 

F. Best : On ne saurait ignorer les avancées du droit international et du droit à l’éducation qui se font grâce aux organismes liés aux Nations-Unies tels l’UNESCO. Les écoles associées à l’UNESCO sont l’un des instruments qu’a mis en place cette organisation pour expérimenter, de par le monde, la solidarité entre écoles, les projets éducatifs (comme ceux autour du thème de l’eau ,ou du développement durable).En ce qui concerne l’éducation civique le manuel pour l’éducation aux droits de l’homme ,intitulé « Tous les êtres humains »a été écrit pour les enseignants du monde entier, à partir d’essais effectués par des écoles associées à l’UNESCO.

L’éducation aux droits de l’Homme a remplacé,à l’UNESCO, ’l’enseignement des droits de l’Homme’ qui était destiné aux seuls futurs juristes. Pourvu que l’on ne revienne pas ,en France ,à des formules d’« instruction civique » ou de « morale » sans fondement , notamment sans la référence aux droits de l’Homme ! A l’UNESCO comme à la CNCDH j’ai souvent appelé à la coopération entre juristes et pédagogues. Des progrès lents mais indéniables ont été accomplis dans cette voie, comme en témoignent les professeurs qui collaborent avec des avocats du barreau de Paris ou avec des magistrats.

Le progrès de nos enfants et du système éducatif tiennent autant au respect des droits de l’Homme qu’à l’évolution des démarches pédagogiques, scientifiques et techniques. Il s’agit d’un Respect éclairé par un savoir civique, par des actions réfléchies, par des éléments organisant la démocratie à l’école. L’école de la république est ou devrait être une école démocratique où le respect de toute personne, élève ,enseignant, personnel de service devrait être la règle.

Propos recueillis par Eric Pateyron 

 

 

 

 


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